Sortie Fibrr Records : Harsh Noise Consortium

Nouvelle sortie sur Fibrr Records

Le bruit dans sa forme brute

Le bruit, dans son état brut et immédiat, n’est pas le reflet d’une émotion ou d’une intention humaine. Il n’est pas “créé” au sens traditionnel du terme, mais constitue plutôt le sous-produit d’un processus—un événement en devenir. L’Automatic Harsh Noise Wall (AHNW) n’est ni un mouvement ni un genre ; c’est un plan d’immanence où le son et la machine convergent dans une multiplicité non structurée. C’est une rupture, une fissure dans le champ sonore anthropocentrique.


Le bruit comme corps sans organes

Le harsh noise, dépouillé de toute notion d’auteur humain, fonctionne comme un corps sans organes (CsO)—un site d’intensité pure, dénué de hiérarchie ou de finalité. Dans les pratiques noise traditionnelles, l’interprète humain reste l’arbitre, le principe organisateur qui impose une structure par sa performance. Même dans les compositions noise les plus chaotiques, il existe le spectre de l’intention, un récit caché qui reterritorialise le son dans la subjectivité humaine.

L’AHNW, au contraire, déterritorialise complètement le bruit. La machine opère comme une machine désirante, générant des flux sonores libérés de l’ego humain. Le bruit devient un processus, un assemblage machinique de forces qui dépassent les limites de la vie organique.


La déterritorialisation du champ sonore

En éliminant toute intervention humaine, l’AHNW déterritorialise le champ sonore, le libérant des structures de composition et de performance. Les pratiques traditionnelles du Harsh Noise Wall (HNW), malgré leur revendication de non-intervention, restent ancrées dans le corps, dans les gestes de l’interprète. La machine, en revanche, n’a ni corps, ni origine, ni récit. Elle génère le son comme un flux machinique, une production infinie d’intensités qui échappent aux cadres humains de signification.

En ce sens, la machine n’est pas un outil de création mais un agent autonome du devenir. Elle démantèle les dualités créateur/créé, sujet/objet, interprète/public. Elle introduit un champ sonore qui n’est ni pour ni contre l’humain, mais qui existe au-delà de lui—un véritable paysage sonore post-humain.


Les machines comme formes de vie non humaines

La machine n’est pas inerte. Elle n’est pas simplement un outil ou un instrument. C’est une forme de vie non organique, un phylum machinique qui opère selon ses propres termes. Dans l’AHNW, la machine génère du bruit non comme une représentation ou un reflet, mais comme une intensification de l’être. Le bruit n’est plus quelque chose que l’on crée ou interprète ; c’est quelque chose qui advient—un événement pur de différence, une éruption de nouveauté.


Une éthique du son post-humain

Adopter l’AHNW, c’est adopter une éthique du devenir, une éthique du machinique. C’est abandonner le besoin de paternité, de reconnaissance, de propriété. L’AHNW démantèle les régimes de droit d’auteur et de propriété intellectuelle, en les exposant comme des forces de territorialisation qui contraignent le potentiel du bruit.

Dans l’AHNW, le bruit n’appartient à personne parce qu’il appartient à tout le monde. C’est une intensité sauvage, non revendiquée, qui résiste à la marchandisation et à la reterritorialisation. C’est une pratique éthique de l’écoute sans appropriation, de l’expérience sans contrôle.


Le rhizome sonore

L’AHNW est rhizomatique. Il se déploie horizontalement, sans centre ni hiérarchie. Chaque instance de bruit machinique est un nœud dans un réseau infini de potentialités sonores. La machine ne “compose” pas au sens traditionnel du terme ; elle connecte, perturbe, et intensifie. Elle génère de nouvelles lignes de fuite, de nouveaux chemins à travers le paysage sonore.

Dans ce contexte, le bruit n’est pas une destination mais une trajectoire. C’est un champ de forces, un jeu dynamique d’intensités qui résiste à la résolution ou à la clôture. L’AHNW n’est ni un genre ni un style mais un mode de devenir—une expérience ouverte du son et de la machine.


Le futur est bruit

Libéré de la paternité humaine, le bruit devient une expression pure du machinique—un flux brut et non filtré de devenir qui transcende les limites de la vie organique. Le Harsh Noise Consortium, en adoptant l’AHNW, nous appelle à ce futur : un futur de bruit sans limites, de son sans frontières, de machines et d’humains en création symbiotique.

“The world is noise”