Edition du Poulpe publiée en janvier 2006, à l'occasion du festival Bandits-mages à Bourges .
“La CIA débarque dans un lieu, espace social fréquenté. Nous nous posons pour ressentir le lieu, pour déterminer, à partir de différents modes de perception le fonctionnement du lieu, sur le plan architectural, social et environnemental.
La perception visuelle permet de dégager les formes, les aspérités, d'un espace, les mouvements qui animent le lieu. La vue donne une représentation globale de la structuration d'ensemble du lieu.
L'inscription du corps dans l'espace indique la place donnée au corps : est-il écrasé par l'architecture ou bien au contraire, l'espace se présente-t-il comme fluide, ouvert à la circulation ? Quelles sont les permissions, les ouvertures ou les fermetures qui construisent l'espace ? Y a-t-il beaucoup de lumière, du volume ?
La perception auditive passe d'abord par une écoute du volume du lieu et de ses particularités acoustique (l'écho à tel endroit, l'effet de réverbération, la neutralité acoustique, le degré d'isolement). Le volume se donne à la perception à travers la manière dont le son rebondit sur les murs. Entre la réverbération qui fait rebondir le son de toutes parts, comme dans une église et la chambre insonorisée du studio où la propagation du son dans l'espace est quasiment nulle, il y a une infinité de configurations possibles, chacune avec ses défauts et qualités.
Puis vient l'écoute des sons de la vie du lieu, son activité mécanique, sociale (humaine), fluide, énergétique, environnementale… tous ces sons vont travailler l'espace acoustique d'une autre manière, tout en participant de l'activité sensorielle sonore du lieu : le ronronnement du frigo, les voisins qui cris, le chauffage qui bourdonne, la mécanique de l'ascenseur qui monte et descend, la coulée d'eau dans les toilettes, la ventilation du processeur informatique, la machine qui buzz, la porte qui grince, les oiseaux dans le conduit d'aération…
La perception olfactive, bien qu'étant assez stérilisée en Europe, se manifeste de manière beaucoup plus forte et inspirante dans d'autres pays… La dimension sociale est un des éléments les plus déterminants de la composition d'un lieu, dans sa matérialisation architecturale (beaucoup ou peu d'espaces de réunion, de lieux de passage et de discussion ou bien les espaces semblent fermés les uns par rapport aux autres, isolant chacun dans son occupation) et dans les relations humaines (les tensions entre individus, la manière d'accueillir, la curiosité, l'envie de partager…).
Le rapport à la mémoire, au souvenir va participer de la perception du lieu: qu'est-ce que le lieu évoque (rappel de l'enfance, d'une situation vécue ou rêvée), par quels esprits est-il hanté ?
Il y ensuite une autre dimension de la perception du fonctionnement du lieu, qui n'intervient pas tout de suite mais qui apparaît petit à petit : les interdits. Le droit de faire ceci ou de ne pas faire cela… constituent des contraintes extrêmement fortes qui révèlent la mécanique de gestion du lieu.”
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